jeudi 3 janvier 2008

L'horreur dans le métro

Il y a quelques temps de cela, Maurice Dupuis (de Paris) vous avait mis au fait de l’existence d’un redoutable prédateur, la chaise de bureau. Aujourd’hui encore, dans sa grande bonté, et pour protéger les âmes innocentes du danger, Maurice Dupuis a décidé de présenter un fléau qui fait rage dans la région parisienne.

Depuis la nuit des temps, on n’avait pas connu pire calamité. Les légendes et mythes sont emplis de récits de catastrophes, toutes plus atroces les unes que les autres. Les Dieux s’évertuent depuis l’aube de l’humanité à pourrir la vie de ceux qui ne les vénèrent pas, pour flanquer une sainte trouille aux autres et leur insuffler juste ce qu’il faut de ferveur religieuse. Oh, bien sûr, ils ont fait fort au cours des siècles, la Nature elle-même n’étant pas en reste en matière d’accumulations catastrophiques pour le genre humain. Mais l’éruption du Vésuve et les douze plaies d’Egypte ne sont rien, RIEN, face à l’abomination que Maurice Dupuis va vous présenter aujourd’hui ! Place ! Car voici venir … les 4 plaies du RER ! *TA DA DAAAANNN*

En effet, Maurice Dupuis, de Paris, fréquente de manière quotidienne ce lieu de tous les dangers. Et de ces observations, il a retiré un certain nombre de comportements et d’individus dont la disparition subite et totale, telle celle des dinosaures il y a des éons, ne pourrait qu’être bénéfique à l’Humanité. Darwin, à nous !

La première –comprenez bien qu’il ne s’agit pas là d’une énumération graduée dans l’horreur, mais d’une simple facilité pour présenter ces choses– de ces plaies est constituée des utilisateurs de baladeurs en tout genre. Il se trouve qu’une portion non négligeable de cette population est composée de sinistres individus qui, non contents de se détruire les tympans au doux crincrin de leur musique poussée à des volumes démentiels, en font profiter tout le voisinage (et parfois même fort éloigné, le voisinage, c’est que ca crache ces engins là). Quoi de plus irritant pour l’Honnête Homme (comme dirait le regretté Confucius) fourbu (ou ensommeillé, selon si l’on se situe le soir après une dure journée de labeur, ou aux aurores, en route vers le sain travail qui permettra d’amener le pain sur la table) que d’avoir les oreilles désagréablement chatouillées par quelque relent de mauvaise musique (car le faquin musicogène n’écoute que rarement du Mozart à fond les ballons) criarde émise par un quelconque trublion voisin ? Fichtre ! Mais dites moi, n’est ce pas l’utilité du casque de justement pouvoir écouter sa musique sans gêner les personnes alentours ? Apparemment, cet usage est tombé en désuétude, au plus grand dam de Maurice Dupuis (de Paris). Il a même, un jour, et avec horreur et lassitude mêlées, été témoin d’un maroufle qui, non content de laisser tourner à des volumes impossibles son baladeur, avait jugé bon de retirer ses écouteurs et de les laisser pendre sur son col – sans doutes avait il trouvé plus simple d’éloigner la source du bruit plutôt que de baisser le volume ? Ah, mes amis, fuyez, fuyez loin, car il est trop tard, cette engeance est malheureusement trop implantée parmi nous pour qu’il y aie quelque espoir de rédemption !

Mais il est une autre catégorie de sinistres personnages qui cohabitent avec les sus-cités, et qui n’ont rien à leur envier en matière de pourrissage d’environnement, j’ai nommé : les maniaques du téléphone portable. Il est de notoriété publique que, si l’invention du téléphone portable n’est pas directement due au Malin, ce dernier a néanmoins joué un rôle majeur dans la popularisation de son utilisation dans les lieux publics. Maurice Dupuis l’a pressenti, dés l’époque ou on voyait des gens se pavaner dans la rue avec leur téléphone, et tenir –bien fort, je vous prie- des conversations de haute volée commençant invariablement par « Tu ne devineras jamais d’où je t’appelle » et se poursuivant fort souvent sur des thématiques telles que « Ben là, j’suis dans la rue, je marche, avec mes jambes, et tout ». On eut pu croire que l’engouement pour la téléphonie mobile, et surtout les comportements m’as-tu-vu-tesque associés allaient se banaliser avec le passage du temps : eh bien non. Pire : ils ont évolué, grâce aux progrès de la technologie, vers des sources d’emmerdement pour l’environnement innocent encore plus diverses. On peut maintenant, grâce à l’accroissement de l’autonomie des batteries, profiter pendant tout le trajet Chatelet-les-Halles / Orsay Ville des conversations passionnantes de la lycéenne boutonneuse lambda, ou du YUPy delta, avec force exclamations et détails, Maurice Dupuis vous prie de le croire. Mais attention ! Là ne s’arrêtent pas les joies de la téléphonie. Car ces engins de mort peuvent désormais faire office de baladeur, et on tombe donc fréquemment dans la situation précitée. Le pire étant ces maroufles ignorant tout de la technologie des écouteurs (ou décidant sciemment de s’en passer, ce qui serait plus probable), et qui utilisent, tels ces petites frappes des années 80 et leur lecteurs cassettes, leur téléphone pour diffuser plein pot leur musique et en faire profiter toute la rame de RER (musique de piètre qualité, il a déjà été exposé pourquoi, ce à quoi on peut rajouter la piètre acoustique fournie par les hauts parleurs de téléphone, logiquement non conçus pour jouer le rôle d’un ampli de salle de concert). Vous l’aurez compris : parmi les légions de l’emmerdement dans les transports en commun, si le walkmaneur est piquier, le téléphoneur mobile est le lourd cavalier en armure, sur le passage duquel la bienséance ne repousse pas.

Vous l’aurez remarqué (car, en tant que lecteurs-disciples de Maurice Dupuis de Paris, vous vous évertuez à développer un sens de l’observation digne des meilleurs pisteurs apaches), ces nuisibles ont un point commun : hors quelques rares exceptions, il s’agit de pollueurs sonores. Ils sont à ranger dans la même catégorie que les braillards qui ne savent s’exprimer qu’en vomissant les décibels (et qui constituent, au passage, une autre belle catégorie d’emmerdeurs).

Ah, si seulement, si SEULEMENT, les fléaux qui se tapissent dans le RER se limitaient à ca ! Hélas, l’impolitesse humaine est un peu le shoggoth de la société (là, Maurice Dupuis sait qu’il a perdu 90% de ses lecteurs dans cette métaphore hasardeuse, mais fi ! Culturez vous donc un peu, non mais) : elle peut prendre mille formes plus abjectes les unes que les autres.

C’est ainsi que Maurice Dupuis en vient au chapitre des bousculeurs. Ceux-ci se divisent en deux sous espèces.

D’une part, le bousculeur-qui-monte-sans-laisser-descendre ( Bousculoris ascendens emmerdoris de son petit nom latin). Ce triste sire vit en troupeaux, sur son habitant naturel, le quai de RER (ou de métro, ou arrêt de bus, selon les sous variétés). L’étrange animal (plein de rage, souvent, comme l’avait pressenti ce bon vieux Jean) possède un instinct qui le pousse, contre vents et marées, à se presser en grappe contre les portes du véhicule fraichement arrivé, au mépris de la santé de ses congénères, et surtout, en empêchant le voyageur las de descendre de son wagon. Ce faisant, il donne lieu (voire initie, selon l’agressivité latente de l’individu) à moult invectives et bousculades.

Le Bousculoris ascendens emmerdoris est, bien souvent, mais pas systématiquement, en conflit avec son cousin pas si éloigné, le bousculeur-qui-veut-absolument-ouvrir-la-porte (Bousculoris porti-fétichistus). De récentes études de l’université de Cambridge (menées en collaboration avec Maurice Dupuis de Paris, membre honoraire de la chaire de sciences sociales, entre autres) ont prouvé qu’à une époque, ces étranges animaux étaient des humains comme les autres, ce qui explique leur anthropomorphisme troublant. Une mutation, encore inexpliqués, les a mentalement bloqué au stade infantile dit du « je veux toucher à tous les boutons, na ! », et entraine une dégénérescence progressive vers le triste état qui devient le leur. Ces études ont également laissé supposer (mais rien n’est encoer définitivement prouvé) que les individus de cette espèce étaient susceptibles de muter très rapidement en fonction de leur environnement vers l’une ou l’autre des espèces (Bousculoris ascendens emmerdoris ou Bousculoris porti-fétichistus), selon qu’ils se trouvent sur un quai ou dans une rame. Toujours est il qu’ils sont aisément repérables : quelques dizaines de secondes avant l’arrivée en gare, l’individu le plus rapide du troupeau se précipite (suivi de ses confrères moins gâtés par la nature) vers les portes, bousculant au besoin toutes les personnes sur son chemin, avant de se saisir de la poignée d’ouverture de la porte avec un petit sourire de contentement personnel. Cette démonstration d’impolitesse est souvent accompagnée d’un borborygme que les linguistes pensent pouvoir traduire par « Pardon, j’descend a la prochaine », bien qu’il semble peu vraisemblable que l’animal n’aie pas conscience que les 15 personnes, sur les pieds desquels il vient de marcher et qui attendent également devant la porte, descendent également à la même station. Enfin, fier de son exploit, l’individu conclut sa performance en traversant à grand renfort de coups d’épaules la masse compacte des Bousculoris ascendens emmerdoris qui se tasse sur le quai, avant de s’élancer d’un petit pas de course dans les escalators (en panne, comme toujours, merci la RATP).

Alors, comment vous sentez vous désormais ? Maurice Dupuis (de Paris) lit dans vos yeux une crainte qui n’y était pas présente auparavant. Ah ! Vous en savez désormais un peu plus sur l’horreur rampante. C’est le prix à payer pour la connaissance. Au moins, personne en vous a forcé à participer à des cérémonies impies au clair de lune au fond d’un souterrain (vous comprenez un peu mieux pourquoi n trouve de moins en moins de cultes maléfiques dignes de ce nom ? les pré requis ne sont pas évidents), en sacrifiant quelque vierge à une idole venue du fond des âges en psalmodiant des cantiques gutturaux qu’aucune gorge humaine ne devrait pouvoir prononcer…

Bref, grâce à Maurice Dupuis, vous vous êtes culturé facile. C’est pas beau ca ?

Méditez bien ceci, et à bientôt pour de nouvelles révélations passionnantes !